Petit casse-tête fiscal expatriation

Bonjour à tous, première création de sujet sur mon cas et semble-t-il sur l’expatriation en générale. Cela intéressera peut-être certains intellectuellement et pratiquement.

Je vais donc parler du côté expatriation, et de la fiscalité dans mon cas assez précis, et présenter des pendants japonais à certains systèmes sociaux et enveloppes fiscales françaises sympas :

Actuellement : Français, marié à une japonaise fin d’année dernière.

Entrepreneur individuel en France, maquettiste-infographiste sous le régime micro-entreprise.

LDDS plein comme épargne sécurité.
Livret A selon dépenses, charges planifiées à venir et comme cash dispo lors d’opportunités.
Je verse le max sur le PER tous les ans jusqu’à raboter quasi intégralement ma part imposable à 30 %, ensuite PEA et un peu en AV pour compléter mon tableau d’allocation cible en pouvant arbitrer à l’intérieur sans frais.

Vient le changement qui fait s’intérroger beaucoup : après le process qui prend le temps qu’il prend pour obtenir un visa d’époux, emménagement durable au Japon d’ici fin de l’année.

Ce que cela implique, si j’ai bien fait le tour des infos :

Réponse après avoir contacté le service des impôts en France

Concernant les revenus de source française imposables en France, il convient de se référer à la convention internationale entre la France et le Japon.

Pour les revenus de professions indépendantes de source française :

L’article 7 de la convention entre les 2 pays précise que ces revenus sont imposables dans l’état où est enregistrée l’activité.

Si la micro-entreprise est enregistrée auprès de l’URSSAF avec donc une adresse de domiciliation en France, alors ces revenus seront à déclarer et imposés en France.

Pour les revenus immobiliers de source française :

L’article 6 de la convention entre les 2 pays précise que ces revenus sont imposables dans l’état où est situé le bien.

Si les revenus immobiliers font suite à un bien situé en France, alors ils seront imposables en France.

Pour les assurances vie (intérêts) de source française :

L’article 11 de la convention entre les 2 pays précise que les intérêts sont imposables dans le pays de résidence (article 11.1) et également dans le pays source des revenus avec un taux qui ne peut excéder 10% (article 11.2) .

Par ailleurs, les revenus de capitaux mobiliers (intérêts et dividendes) des non-résidents ne sont pas soumis aux prélèvements sociaux (17,2%).

Ces revenus sont soumis au prélèvement libératoire de la part de l’organisme qui verse les intérêts et devez leur fournir une attestation de résidence fiscale au moment du rachat afin qu’il vous soit appliqué le bon taux.

Si l’assurance vie (de source française) à plus de 8 ans, le taux du droit interne est de 7,5% (sans prélèvements sociaux).

Pour les comptes titres (CTO) de source française :

Cela dépend du type de revenus des comptes titres.

Pour les intérêts, bien que la convention prévoit une imposition par la France, selon le droit interne (code général des impôts), ces derniers sont exonérés d’impôt pour les non résident contrairement à ceux des assurances vie (article 125 A III du code général des impôts).

Pour les dividendes, la convention entre les 2 pays précise qu’il sont imposables dans le pays de résidence (article 10.1) et dans le pays source des revenus (article 10.2.b) avec un taux qui ne peut excéder 10 % (au lieu de 12,8% du droit interne).

Comme pour les intérêts, les revenus de capitaux mobiliers des non-résidents ne sont pas soumis aux prélèvements sociaux (17,2%).

Pour les plus-values, les gains ne sont imposables que dans l’état de résidence selon l’article 13.6 de la convention entre les 2 pays.

Les revenus des comptes-titres sont soumis au prélèvement libératoire de la part de l’organisme qui les versent et devez leur fournir une attestation de résidence fiscale afin qu’il vous soit appliqué le bon taux.

Calcul de l’impôt :

L’imposition des revenus de professions indépendantes et des revenus immobiliers est le taux minimum de 20% en tant que non résident, auquel s’ajoute les prélèvements sociaux au taux de 17,2% pour les revenus immobiliers.

Vous avez la possibilité de demander le calcul de votre impôt avec l’application du taux moyen.

Celui-ci consiste à indiquer le revenu mondial perçu par le foyer (revenus de source française + revenus de source étrangère perçus par vous uniquement si vous êtes célibataire fiscalement ou ceux perçus par vous et votre conjoint si vous êtes mariés fiscalement).

Ce revenu mondial est soumis au barème progressif (comme un résident fiscal en France) en tenant compte du nombre de parts et des différentes tranches d’impositions.

Le taux qui en résulte est alors appliqué sur vos seuls revenus de source française imposables en France (appliqué uniquement si plus favorable que le taux minimum de 20%).

Lors de la déclaration en ligne vous pouvez opter pour le taux moyen en cochant la case " bénéficier du taux moyen d’imposition " située à la 1ère page de l’étape 3 dans la rubrique « non résident » ce qui aura pour effet de faire apparaitre la rubrique " revenus de source française et étrangère retenus pour le calcul du taux moyen " en fin de parcours (située juste après la page « Informations - mention expresse »).

Dans cette rubrique vous devrez indiquer si vous avez perçu des revenus non imposables en France en sélectionnant la catégorie.

L’année de départ cette rubrique n’est pas proposée et devez préciser vos revenus mondiaux dans la rubrique " informations " si vous souhaitez opter pour le taux moyen.

Les revenus de capitaux mobiliers (intérêts d’assurance vie et dividendes) sont soumis au prélèvement libératoire de l’impôt par l’organisme qui vous les versent et devez donc indiquer ces revenus en case 2EE de la déclaration afin qu’ils ne soient pas imposés de nouveau par notre service.

La convention internationale prévoit l’élimination de la double imposition par le pays de résidence à l’article 23.

Vous devrez donc vous rapprocher de l’administration fiscale japonaise, afin d’y connaitre les modalités déclaratives et que leurs services procèdent à l’élimination de la double imposition dans le cas où ils imposeraient vos revenus de source française déjà imposés en France.

Pour faire simple :

Mon activité (tous mes clients sont des boîtes françaises) et ma facturation restent basées en France.
Apriori, revenus de source française, en demandant le taux d’imposition moyen (semble meilleur dans mon cas), cela ne change du coup absolument rien en terme de cotisations et impôts sur le revenu du côté de ma micro-entreprise en France, facile.

Sur les différentes enveloppes, pareil pour faire simple, le mieux est de ne rien désinvestir, sauf le rachat sur AV qui peut sembler intéressant éventuellement (fiscalité toujours avantageuse côté français).

Pas de cotisations sociales sur les revenus de capitaux, sauf immobilier.

Sinon infos pas claires sur les possibilités de versements sur le PEA, mais si je ne me trompe pas, tant qu’il n’y a pas eu de retrait avant 8 ans, les versements restent toujours possibles, mais pas d’avantage fiscal au Japon lors de retraits. Et apriori les versements PER ne sont plus déductibles du revenu imposable…

Au Japon :

En dessous de 5 ans de résidence je serais vraisemblablement considéré comme résident non-permanent, et serait seulement imposable sur la fraction de revenu qui serait effectivement utilisée au Japon (transfert bancaire, mais aussi par assimilation lors de l’utilisation d’une carte bancaire étrangère au Japon), à voir à l’usage avec le crédit pour impôt déjà payé en France.

Après 5 ans, “résident permanent” (au sens fiscal, pas au sens de statut de séjour qui offre un visa spécifique avec droits de séjours à vie), imposition sur l’ensemble des revenus mondia.

Dans les 2 cas : La base imposable consiste en : CA de la micro-entreprise, mais pas d’abattement forfaitaire comme en France, à la place je devrais plutôt déduire des frais réels (les cotisations URSSAF rentrant dans ce cadre, et autres achats et dépenses nécessaires à l’activité)
Mes charges professionnelles étant faibles, la base d’imposition est plus élevée qu’en France avec l’abattement forfaitaire.

Maintenant le cœur de l’imposition : impôts sur le revenus et impôts locaux :

En gros cela représente un taux d’imposition sur l’ensemble du revenu imposable tel que décrit plus haut, avec :

  • un abattement forfaitaire de base de 480 000 ¥,
  • un abattement selon la tranche d’imposition.
  • les contributions obligatoires de sécurité sociale (cela dépend un peu selon les préfectures, mais correspond environ à 15% du revenu comme indépendant (pour des salariés et employeur c’est un peu plus haut car intégrant assurance chômage, et partagé à moitié entre les deux) et se retrouve plafonné au-delà d’un certain montant, un peu plus de 1 000 000 ¥, vraisemblablement mon cas) + dépenses de santé importantes (type reste à charge hospitalisation longue)
Note sur le système d’assurance maladie japonais

Même couverture sociale pour tous, les assurances supplémentaire types mutuelles ne sont pas forcément nécessaire et peu répandues. Le système couvre dans tous les cas 70 % de la dépense, 30 % de reste à charge. Les coûts sont globalement OK, et surtout l’offre de santé au Japon est d’une qualité et d’une efficacité INCROYABLE (en tout cas en ville, mais n’importe quelle petit bourg se retrouve avec une forte densité de population et est plutôt bien doté, il y a un certain orgueil national à avoir un système de santé performant, en tout cas jusqu’à maintenant, mais on connaît la situation démographique, et les coûts du système augmentent en flèche, comme dans tous nos pays “développés”). Le reste à charge lors de dépenses importantes de santé est capé selon la situation de chacun, si le coût est supérieur il peut être récupéré.

- contribution au système de retraite (il semblerait qu’il soit possible d’être dispensé de cotiser pour la retraite avec une attestation de cotisation au système de retraite français, sinon 17 000 ¥/mois pour dans le cas de revenus 100% hors Japon, comme moi)

  • si existantes, différentes primes d’assurances diverses (assurances séismes, assurances décès, accidents, etc.)

Tout cela est entièrement déductible du revenu imposable.
De même pour les contributions iDeCo, pour maximum 68 000 ¥/mois = 816 000 ¥ (proche PER, que je compte utiliser à fond, voir plus bas)

Après tous ces abattements est déterminé le revenu imposable.
Vient ensuite un barême progressif pour déterminer l’impôt sur le revenu dû, duquel est retranché l’impôt déjà payé en France dans le cas présent.
En plus de l’impôt national sur le revenu, ajouter un impôt local supplémentaire de 10% sur le revenu imposable.
Et encore un autre impôt spécial “reconstruction” (dégâts catastrophes naturelles, séismes, etc.) de 2,1 %

Tout ceci étant dit, si je ne me trompe pas je vais me retrouver avec un impôt quasiment doublé voir triplé, si je n’ai pas pu réduire ma base imposable dans la tranche 30% française avec les versements PER.

Et j’ai aussi cotisé pour un 2e système de santé au passage, mais je vis dans le pays et vais en bénéficier, c’est normal (par contre si je pouvais éviter de payer cette partie là en France ça serait bien, mais ma foi j’utiliserai les deux systèmes pour ma santé là où cela fera sens, même si j’espère bien que ça sera des cotisations qui ne me serviront jamais personnellement pour des trucs coûteux !!)

Donc méga aïe au final !

Pour tout ce qui serait revenus, dividendes, rachats, plus-values réalisées, etc., ce qui est de source française serait imposé comme le reste en France, et pas de cotisations sociales. Les autres sources se retrouvent imposé au Japon, avec une flat tax de 20,315%.

À propos des enveloppes d’investissement intéréssantes au Japon, voici les pendants de nos PEA et PER. Et franchement, elles sont assez excellentes (dans les deux cas les frais à l’usage et sur les produits sont aussi inférieurs à ce qu’on a en France) :

PEA (France) :france: New NISA (Japon) :japan: PER (France) :france: iDeCo (Japon) :japan:
Épargne en actions européennes (mais ETF swap dispo) Tout type d’investissement Épargne retraite (privée) Épargne retraite (privée)
Croissance et retraits non imposés (après 5 ans). (Max. 150 000 € + 75 000 € PEA-PME) Croissance et retraits non imposés. (3.6 M ¥ / an, 18 M ¥ max) Versements déductibles du revenu imposable français. (10% revenu ou ~4700 €) Versements déductibles du revenu imposable japonais. (813 000 ¥ / an)
Liquidité totale (mais fiscalité optimale après 5 ans) Liquidité totale. Retraits possibles à tout moment. Bloqué jusqu’à la retraite ou évenement majeur. Bloqué jusqu’à 60 ans.
Pas clair. Possibilité de faire des versements en tant que non-résident ? Mais avec ma situation, il semblerait que je sois toujours théoriquement résident fiscal français, mais avec domicile fiscal à l’étranger, je ne sais pas si cela fait une différence. Ne pas faire de retraits pour gérer le stock existant, qui conserve la non-fiscalisation lors d’opérations internes au PEA Maximale. L’outil parfait pour la croissance de mon patrimoine, liquide et sans impôt sur les gains. L’avantage de la déduction fiscale est-il perdu ? Même question que le PER, suis-je toujours bien considéré résident fiscal français, ma micro-entreprise étant domiciliée en France, même avec un autre domicile fiscal au Japon ? Top. Permet de réduire mon impôt sur le revenu japonais, qui est bien réel malgré le crédit d’impôt étranger.

NISA et iDeCo sont vraiment du tonnerre.

Taux de change et risque de change à garder en mémoire, mais cela peut permettre d’arbitrer les versements d’un mois sur l’autre, si les versements sont toujours possibles en France, en fonction de l’évolution du taux de change, question qui peut être intéressante. De même pour le timing des retraits le moment échéant. Mais toutes ces questions et la fiscalité ont le temps d’évoluer…

Les impôts risquent d’être douloureux quand même après tout cela. À voir sur pièces.

Pistes futures pour moi :
montage en SAS, Holding, SCI, versements petits salaires, autres pour réduire l’assiette imposable dans les deux pays ?
Mais dans ce cas peu de revenus et donc de versements sur les différentes enveloppes, contrats de capitalisation en société, investissements en SCI ?

Voilà, j’espère que je n’ai pas fait d’erreur dans ma compréhension de cette situation un peu complexe, et que ces différents morceaux de fiscalité et d’enveloppes étrangères intéresseront potentiellement quelques personnes.
Et je suis preneur de vos avis et suggestions si vous en avez bien sûr !

Merci de m’avoir lu

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Hello @Cyphr,

J’ai pris ton casse-tête, j’ai joué un peu avec, et puis je l’ai reposé sur la table :grin:

Mais bravo pour l’effort d’explication, c’est très clair. J’espère qu’un autre membre aura envie de s’y coller, je suis curieuse de voir quelle solution on peut trouver.

2 « J'aime »

J’espère que ça a été un minimum intéressant /stimulant, merci d’avoir pris le temps !